Perceptions culturelles du Sud-Born et Marensin

Dernière mise à jour : 2 février 2023

Les étangs, les fleuves côtiers (les courants) et, dans une moindre mesure, la forêt sont les motifs des artistes qui se sont arrêtés pour peindre ou photographier les paysages du Sud-Born et Marensin. Ce n’est principalement qu’à partir de la seconde moitié du XXe siècle que l’océan, la plage deviennent des sujets d’expression plus présents. Aujourd’hui, les représentations contemporaines issues du tourisme font part égale entre ces différents paysages, tout en privilégiant de manière très nette les ambiances de « nature ».

Azur, le ponton sur le lac de Soustons, 2021
Image extraite du site Internet de l’Office de tourisme intercommunal Landes Atlantique Sud, 2021
 

Cette image contemporaine démontre l’attractivité paysagère et touristique qu’exercent aujourd’hui comme hier les lacs rétro-littoraux. Elle met en valeur le calme de l’étendue d’eau à l’horizon borné, sans élément visuel perturbateur, par la ligne formée par la forêt. Au centre de l’image, le ponton ajoute aux ambiances de nature l’idée d’accueil et de loisir et, par la perspective créée, esthétise encore davantage le site.

« L’arrivée à Contis me paraît encore aujourd’hui saisie par la grandeur. Avec un temps d’arrêt dans le rythme de nos battements de cœur, le souffle suspendu quand le chemin paillé s’arrêtait là, face à la mer, acquérant au point même de sa fin, un prolongement sans mesure.
[…]
Je l’ai dit des chemins, des routes, des voies, des arbres ; je découvrais ici la fine tranchée de la forêt d’un vert massif coupée net au trait de sable pâle ; l’horizon tout droit pour limiter le monde inaccessible ; la mer étendue bleue et verte avec la longue bordure en relief
des vagues, énormes rouleaux des grandes marées réduits par le vent d’Est à un mince liseré blanc immobile ; la plage, vingt kilomètres visibles à nos yeux et davantage encore notre certitude que rien ne borne sa beauté. Enfin la dune étirée qui regarde monter l’océan et surveille le vent. Sur sa crête la mince verticale d’un piquet de fer noir est posée tous les kilomètres justement pour donner avec les étoiles les seuls points de repère de nos jours et de nos nuits, ce qui nous permet de nous tenir debout aussi, en petits éléments indépendants pour retrouver l’échelle et la modeste vérité des hommes. »

Renée Ardilouze, Je me souviens des Landes, Latitude Sud, 1999

  Les étangs et les courants, des paysages aimés et représentés

Les lacs de Léon et de Soustons sont sans doute, avec les courants de Contis et d’Huchet, les éléments les plus caractérisés de l’unité de paysage. Motifs constants des peintres du XIXe siècles, ils sont aussi ceux des photographes du XXe et du XXIe siècle.

L’étang de Léon et le courant d’Huchet

Les images de l’étang du Léon et le courant d’Huchet sont nombreuses. Elles déclinent depuis le milieu du XIXe siècle les qualités de ces paysages de l’eau, à l’arrière des dunes littorales.

L’étang de Léon, le paysage classique des grands plans d’eau des Landes
Jean-Roger Sourgen (1883-1978), Soir sur l’étang de Léon, sd
Reproduction en noir et blanc extraite de : Émilie Sirieyx de Villers, Le peintre landais J.-R. Sourgen, préface de Francis Jammes, Librairie D. Chabas, 1931. Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque de l’INHA / coll. J. Doucet
 

Jean-Roger Sourgen, peintre inlassable des paysages des Landes, du ciel, des dunes, des pins des environs d’Hossegor, fait ici une incursion plus au nord, sur les rives de l’étang de Léon pour en magnifier les lignes élancées des arbres du rivage, la courbe de la forêt qui clôt l’horizon et les aplats en miroir du ciel et de l’eau.
 

Léon, L’étang de Léon, carte postale, Editions Yvon, Paris, années 1910
Archives départementales des Landes, 1 Fi 626
 

Cette photographie du début du XXe siècle, inspirée de la peinture, représente l’étang de Léon, à la tombée du jour, réhausse les lignes fondatrices du paysage du lac et les contrastes de lumières entre le ciel et l’étendue d’eau calme sur laquelle on devine quelques barques au repos.
 

Léon, l’étang, un pêcheur, sd ; Léon, Le lac, sd, cartes postales
Archives départementales des Landes, 1 Fi 9266 et 1 Fi 7820
 

Deux cartes postales de la première moitié du XXe siècle montrant d’abord l’activité vivrière de l’étang de Léon, puis son paysage si caractéristique borné par l’horizon de la forêt que rien ne vient contrarier.

Le courant d’Huchet, un des paysages préférés des Landais

Le courant d’Huchet est souvent cité par les Landais comme l’un des paysages les plus originaux de leur département. Seul fleuve côtier landais à ne pas être endigué, son cours à la sortie de l’étang de Léon bénéficie de la protection d’une réserve naturelle nationale. Ses ambiances comparées parfois à une petite Amazonie sont l’objet de nombreuses représentations [1] qui mettent en exergue son milieu naturel préservé et sauvage.
 

Gaston Larrieu (1908-1983), Le courant d’Huchet à Léon, Plaisir du livre éditeur, 1975
Archives départementales des Landes, 27 FI 8

 
Grâce notamment au choix des couleurs pour décrire la rivière et à l’inclinaison donnée aux arbres qui semblent enlacer le cours d’eau, Gaston Larrieu nous permet de ressentir à la fois la force du paysage et l’ambiance intime du Courant d’Huchet.

 
À gauche, Le Courant d’Huchet, années 1930 ; à droite, Léon, Pont rustique sur le courant d’Huchet, sd, cartes postales
Archives départementales des Landes, 1 Fi 1634 et 1 Fi 4789

 
La représentation du cours d’eau se plait aussi au format vertical qui permet d’embrasser en partie la frondaison des arbres dans le cadre de l’image. La présence de deux hommes semblant perdus au centre de ces deux photographies renforce par contraste celle de la nature.

Le Courant d’Huchet, 2006
Image extraite du site internet du Conservatoire du Littoral
 

L’embouchure du Courant d’Huchet est un site remarquable pour la beauté du paysage créée par ses méandres traçant leur chemin dans les dunes de sable nu ou couvertes de végétation, comme pour la richesse faunistique et floristique exceptionnelle de son milieu. La photo du Conservatoire du littoral qui n’a pas de vocation touristique mais illustre une des pages du site Internet décrivant l’ensemble des paysages littoraux, met en valeur ces deux registres.

L’étang de Soustons et son courant

Plus étendu que celui de Léon et plus urbain aussi, il bénéficie aussi de nombreuses protections (site classé depuis 1968) et de représentations. Sa figuration est souvent semblable à celles des autres étangs de la côte landaise.

Jean-Roger Sourgen, (1883-1978), L’étang de Soustons, sd
Image extraite du site internet de la Gazette Drouot, 2019
 

Ici encore, Jean-Roger Sourgen dépeint l’ambiance unique du lac de Soustons encadré par de grands pins élancés vers le ciel rompant l’horizontale des eaux dormantes du lac. Et, marque caractéristique du peintre, telle une croupe d’animal endormi, la courbe des frondaisons à l’horizon des pins de la forêt des Landes. [2]

Lac de Soustons, 2021
Image extraite du site internet de l’Office de tourisme de la ville de Soustons 

 
Dans cette image de l’étang, si la forêt clôt l’horizon, elle semble plus proche, moins abstraite que dans la représentation qu’en offre Jean-Roger Sourgen. Aussi, l’ensemble invite moins à la rêverie qu’à l’accueil de ses rives très entretenues.

 

 

Le courant de Contis, le phare

Le courant de Contis et la station balnéaire du même nom sont marqués depuis la fin du XIXe siècle par la présence du phare construit dans les années 1860, seul à protéger la côte landaise avec le feu de la jetée de Capbreton. Les peintres et les photographes de la fin du XIXe et d’une grande partie du XXe siècles se préoccupaient moins d’inscrire cette construction comme figure, alors qu’aujourd’hui, « spot » touristique « incontournable », il est devenu avec la descente en canoë ou en paddle du courant, un des éléments omniprésents des représentations.

Saint-Julien-en-Born, Contis-les-Bains. Le Courant, carte postale, années 1910-20
Archives départementales des Landes, 1 Fi 248
 

Le courant près de son embouchure est photographié dans une tradition picturale évidente [3] comme un espace de contemplation et de rêve. Les pins du premier plan, la forêt qui fixe les dunes, l’horizon s’ouvrant sur la mer et son infini forgent des images mentales intemporelles du fleuve côtier.
 

Descente du Courant de Contis en paddle, 2021
Copie d’écran extraite du site internet de l’Office de tourisme communautaire Côte Landes Nature tourisme 
 

Une image du Courant à la fois banale et originale : banale dans sa représentation d’une activité de loisir de plus en plus répandue ; originale, dans la mesure où elle décrit un paysage peu représenté, celui du fleuve côtier courant entre des grandes herbes et la forêt.
 

À gauche, Saint-Julien-en-Born, La Côte d’Argent, Contis-les-bains, le phare, carte postale, 1919. ; à droite, Le phare du Contis, photographie, 2021
Archives départementales des Landes, 1 Fi 8315 et image extraite du site internet de Landes Attractivité 
 

Blanc à l’origine, le phare s’est paré en 1937 d’une peinture en forme de vis d’Archimède. Point de repère émergeant de la masse des pins, il rompt avantageusement l’uniformité du paysage de la côte.
 

Vues depuis le phare de Contis. À gauche, la lette (dépression à l’arrière du cordon dunaire) et à droite, Canopée de la forêt des Landes, 2019
Images extraites de la plateforme collaborative Wikimédia (auteur : Jibi44)
 

Aujourd’hui motif de représentation, l’ascension du phare permet aussi de bénéficier d’un panorama à 360° sur l’océan, les dunes et la forêt.

  Les villages et leurs stations balnéaires

Les bourgs situés en arrière des dunes sont rarement présents dans le corpus des images contemporaines. Quelques images anciennes montrent l’importance de l’arbre, toujours présent en alignement ou le long de la route, rompant ainsi l’uniformité de la forêt.

Léon, À travers les Chênes-Lièges ; Lit-et-Mixe, Avenue d’Uza, cartes postales années 1910-1920, et 1908
Archives départementales des Landes 1 Fi 629 et 1 Fi 7015
 

À gauche, le village de Léon n’est visible qu’à l’arrière-plan, le photographe privilégiant la route plantée de beaux chênes-lièges affirmant ainsi la beauté qu’ils offrent au paysage du bourg. À droite, cette vue plus classique met simplement en évidence le motif toujours présent de la forêt et de la route qui la traverse à proximité immédiate des ensembles urbains.

Moliets-et-Maâ, Vue générale sur les campings, sd ; Vieux-Boucau, Port d’Albret, cartes postales, et 1990
Archives départementales des Landes, 1 Fi 6396 et 1 Fi 4998
 

Comment représenter la côte et son activité touristique ? Les vues aériennes, sans volonté d’esthétisation donnent simplement à voir, à gauche l’étendue des campings installés sur les dunes à proximité de l’océan, et à droite l’ordonnancement utilitariste des installations balnéaires, ici le port d’Albret à Vieux-Boucau.

  La forêt

La forêt est partout présente sans pour autant être mise en image très souvent pour elle-même. Ce sont les photos aériennes qui en disent l’immensité, ou les images des routes, des chemins et des courants qui en expriment les différentes ambiances.

Vieux-Boucau, Forêt de chênes-lièges, carte postale, Editions Van Eyk Rouleau, Bègles, années 1960
Archives départementales des Landes 1 Fi 1422
 

Une photo d’une ambiance forestière de feuillus très rarement représentée et qui donne une autre vision sur les boisements littoraux des Landes.

Les chemins, les routes, les courants pour les ambiances de la forêt
Saint-Girons-Plage, le Grand Tuc, carte postale, 1965
Archives départementales des Landes, 1 Fi 8732

 
Le tuc est en gascon une butte, une colline ou une dune. Dans cette photo des années 1960 intitulée le Grand Tuc, on voit à droite une dune fixée par des plantations alignées. Une image rare qui dit la complexité de la forêt aménagée des Landes, entre dune fixée près du rivage et masse forestière s’étendant jusqu’à l’horizon.

 
Vielle-Saint-Girons, Route de Vielle Saint-Girons, carte postale, sd
Archives départementales des Landes, 1 Fi 4967

 
Cette belle image du début du XXe siècle, très bien composée, montre la qualité donnée par la variété des essences composant cette lisière de la forêt des Landes.

 
Saint-Julien-en-Born, Contis-les-Bains. Le Courant, carte postale, Editions Delboy, Bordeaux, années 1940
Archives départementales des Landes, 1 Fi 252

 
La représentation des courants est très fréquente. Les lisières forestières, les lumières qui les traversent, l’intimité qu’elles créent jouent un rôle essentiel dans la formation des ambiances paysagères des fleuves côtiers.

 
Soustons, Stations d’art : « Itinerêve », parcours artistique à vélo de Soustons à la plage, 2021
Office de tourisme intercommunal Landes Atlantique Sud https://www.soustons.fr/

 

Cet itinéraire artistique est né d’un projet de territoire pédagogique et de la volonté d’une enseignante d’une classe de CM2. Les trente-huit sculptures chaudronnées géantes qui jalonnent la voie verte sont la transcription de l’interprétation artistique des élèves de la faune et de la flore rencontrées sur ces 8 kilomètres de voie verte et de leur collaboration avec des étudiants en BTS chaudronnerie : une manière artistique et contemporaine d’appréhender et de représenter la richesse et le paysage de la forêt.

 

 

Les vues aériennes

Les vues aériennes sont les seuls media qui permettent vraiment d’appréhender l’immensité de la forêt de production situé à l’arrière du littoral.

Saint-Julien-en-Born, Vue générale, 1983
Archives départementales des Landes, 1 Fi 6538

 
Cette vue aérienne des années 1980, outre la représentation de la ville de St-Julien-en-Born et son environnement forestier, permet aussi d’observer, à proximité des ensembles villageois, les ouvertures de clairières cultivées, rompant l’uniformité du paysage.

 
Étang de Moïsan, 2021
Image extraite du site internet de l’Office de tourisme intercommunal Landes Atlantique Sud

 

Le petit étang de Moïsan, entre Messanges et Vieux-Boucau-les-Bains est photographié au centre d’un paysage de clairières cultivées délimité à l’horizon par un vaste ensemble forestier. Cette image est intéressante car elle permet ici aussi de rompre la représentation mentale d’une forêt omniprésente pour laisser place à un paysage plus varié alliant jeunes plantations et parcelles cultivées près des rives de l’étang.


[2Voir aussi la représentation de l’étang de Soustons par Louis-Augustin Auguin dans l’article Paysages de nature : Représentations départementales, Paysages de nature : les motifs des peintres et des photographes

[3Voir aussi le tableau de Louis-Augustin Auguin dans l’article "Les motifs des peintres et des photographes"