Moyen Age - Le territoire se structure
Dernière mise à jour : 1er février 2023
Accès direct
Ve - Xe siècle : fin de l’empire romain et christianisation
Les invasions barbares et la diminution des forêts
De 485 à 950, les invasions successives des Barbares, Wisigoths, Sarrasins, Normands, créent une période de bouleversements dans l’histoire, méconnue par la pénurie de documents écrits. Les chroniques et les récits légendaires, écrits plus tard, rendent les Barbares responsables de tous les cataclysmes survenus sur les côtes landaises et la thèse d’Elisée Reclus (XIXe) leur attribue la destruction des forêts des dunes côtières. Mais d’après Jacques Sargos (XXe), la diminution de cette sylve primitive, plutôt qu’aux violences des barbares, est liée au développement du système agro-pastoral, c’est à dire à la conquête de la lande par l’agriculture. Par ailleurs, un fait naturel survient pendant cette période : les vagues et les vents élèvent le rempart des dunes modernes, entrainant la fermeture des baies et des ports.
Paroisses et églises à partir du VIe siècle
Débutée au IVe siècle, l’organisation des communautés chrétiennes se poursuit. La diffusion du christianisme s’accompagne de la fondation de paroisses rurales et vers la fin du Ve siècle, des églises rurales existent un peu partout mais en petit nombre. Les grands propriétaires terriens ne tardent pas eux-mêmes à adjoindre une église à leur villa. On trouve ainsi aujourd’hui de nombreuses églises, telle celle de Géou près de Labastide-d’Armagnac, dont le cimetière et les champs voisins regorgent de mosaïques.
C’est à la fin du Xe siècle que l’on situe la fondation des abbayes de Saint-Sever et Sorde. L’abbaye bénédictine de Saint-Sever est un des édifices romans les plus importants du Sud-Ouest, son rayonnement a été exceptionnel.
XIe - XIIIe siècles : les temps féodaux, castelnaux et sauvetés, puis bastides
Croissance démographique et économique à partir du XIe siècle
Aux alentours de l’an mille, le territoire est très peu peuplé. Un phénomène d’expansion apparaît dans toute l’Europe occidentale et va s’étendre au sud-ouest de la France à partir du XIe siècle : la croissance de la population et l’essor de l’économie rurale entraînent la transformation des paysages. Parallèlement, s’élabore un monde où le château fortifié devient signe de puissance. Au XIe siècle, se construit le duché d’Aquitaine et de 1154 à 1453, celui-ci se trouve associé au royaume d’Angleterre par le mariage d’Aliénor, duchesse d’Aquitaine. Fragmenté en une multitude de seigneuries, plusieurs familles nobles s’y affrontent.
La vitalité démographique incite à une extraordinaire entreprise de défrichement et de mise en culture. Les seigneurs ecclésiastiques et laïques concèdent des terrains boisés aux paysans pour les mettre en culture, moyennant une redevance. Les monastères se multiplient et les cités renaissent : Saint-Sever se développe à l’ombre de l’abbaye bénédictine. Dax, enserrée dans ses remparts, profite de son port pour l’exportation des vins, et Mont-de-Marsan est fondée en 1133.
Nouvelles formes architecturales
Au Xe et au début du XIe siècle, époque où s’instaure la féodalité, la société aristocratique vit dans des châteaux, castéras, simples donjons de bois à l’origine, posés sur une motte artificielle entourée de fossés. Ensuite, de véritables forteresses voient le jour, autour desquelles viennent se fixer les paysans. L’ensemble est entouré de murailles et s’appelle un château neuf ou castelnau. De nombreux villages sont d’authentiques castelnaux : on les reconnaît à leur structure, souvent circulaire, parfois s’étirant le long d’une rue étroite que domine une motte comme à Castelnau-Tursan, Doazit-en-Chalosse, etc.
A côté des castelnaux, créations seigneuriales, l’Église constitue des asiles de sauvegarde pour fixer les populations, les sauvetés, délimités par des croix dont certaines existent encore. Commencée aux alentours de 1050, la période de création des sauvetés s’étend jusque vers 1130. Peu à peu, les églises et leurs cimetières vont structurer le territoire paroissial. En raison des difficultés de mise en valeur agricole, les pays de landes resteront peu peuplés : le pays de Born compte une église paroissiale pour un peu moins de 10 000 hectares, ceci expliquant la grande superficie des communes actuelles, successeurs des paroisses établies au Moyen Âge.
C’est vers 1250 que commence en Gascogne la construction des bastides qui s’arrêtera cent ans plus tard. Ces lieux de peuplements nouveaux répondent à plusieurs objectifs : loger un excédent de population et cultiver de nouvelles terres, devenir des lieux stratégiques, et réactiver le commerce. La bastide est en effet un centre de commerce, symbolisée par la place centrale bordée de maisons à arcades.
- Remparts et fortification de Mont-de-Marsan, édifiés en pierres coquillières au XIIIe siècle
- Mont-de-Marsan, 2 juillet 2021
Nouveaux échanges
La polyculture (importance des vergers et de la vigne) ainsi que l’élevage assurent la subsistance de la population. Au XIIIe siècle, par l’Adour, un commerce du vin est réalisé avec les marchés anglais et nordiques. Capbreton était à cette époque le seul port sur le littoral, à l’embouchure de l’Adour.
A partir du XIIIe siècle il y a production de gemme et de résine ainsi qu’un trafic bien réglementé de résineux. Les matières résineuses servent notamment à la marine pour le calfatage des navires. Les grands massifs de boisements naturels des pays du Maremne et du Marensin approvisionnent Bayonne, ceux du centre ou du pays de Born (les “montagnes” ou anciens boisements des dunes du littoral) sont commercialisés à Bordeaux.
Pèlerinage de Compostelle et nouvelles routes
- Chemins de Compostelle contemporains en France, tracés à partir des années 1970 sur la base des lieux mentionnés par le Guide du pèlerin et d’hypothèses locales
- Si les tracés détaillés des chemins de Compostelle sont controversés, leur convergence dans le département des Landes ne l’est pas.
Source : Wikipedia
A partir du XIe siècle, des pèlerins venus de toute l’Europe chrétienne s’acheminent à travers les Landes vers St-Jacques de Compostelle. Ils empruntent trois routes : celle du littoral qui suit la ligne des étangs jusqu’à Bayonne ; celle des Grandes Landes, qui traverse le pays des sables par Labouheyre et Dax ; celle des Petites Landes, qui passe par Roquefort, Mont-de-Marsan, St-Sever est un parcours moins redouté (moins de territoire de landes).
XIVe-XVe siècle : guerres et renouveau
Les guerres, dont la Gascogne va subir les effets directs ou indirects près de cent cinquante années durant, constituent une des composantes majeures de la crise des XIVe et XVe siècles.
La guerre de Cent Ans et les églises fortifiées
Après trois siècles continus d’expansion, la première moitié du XIVe siècle marque un arrêt de la progression démographique et de la croissance. A partir de 1330, beaucoup de bastides restent inachevées. A cette stagnation, s’ajoute une série de calamités, guerres, pestes, famines qui déciment une partie de la population, provoquent la désertion des villages, le retour à la friche, le saccage des églises et des monastères. La guerre de Cent Ans, conflit franco-anglais de 1337 à 1453, scinde géographiquement et socialement la Gascogne en deux mouvances opposées.
Les églises fortifiées (Roquefort, Magescq, St-Geours-de-Maremne,..) témoignent de cette période d’insécurité. En effet, les habitants, faute de refuge pour se protéger, entreprennent de transformer leurs églises, sans doute souvent les seules constructions en pierre de la paroisse, en centres défensifs. Le plus souvent, ils construisent des tours carrées, petits donjons plaqués contre la façade.
Fin XVe et XVIe siècles : changements sociaux et renouveau architectural
Au milieu du XVe et au XVIe siècle, s’amorce un renouveau, une reprise démographique et économique. Le métayage se généralise. Les seigneurs et surtout les bourgeois, propriétaires de “bordes”, les donnent en métayage à des paysans, à des conditions très variées concernant la durée du contrat et les obligations.
Une grande activité dans le domaine de l’architecture religieuse comme dans celui de l’architecture civile se manifeste. De nombreux édifices religieux sont agrandis et des manoirs sont bâtis. Mis à part le château de Lacaze à Parleboscq ou le manoir du Lau à Duhort, peu de demeures seigneuriales importantes de la fin du XVe siècle subsistent dans les Landes.
Représentations : un pays désolé où l’on manque de tout
Vers 1150, un guide du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle mettait en garde contre les risques encourus par les pèlerins traversant les Landes et sur la difficulté d’y circuler.
« C’est un pays désolé où l’on manque de tout ; il n’y a ni pain, ni vin, ni viande, ni poisson, ni eau, ni sources ; les villages sont rares dans cette plaine sablonneuse qui abonde cependant en miel, millet, panic et en porcs. Si par hasard tu traverses les landes en été, prends soin de préserver ton visage des mouches énormes qui foisonnent surtout là-bas et qu’on appelle guêpes ou taons ; et si tu ne regardes pas tes pieds avec précaution, tu t’enfonceras rapidement jusqu’au genou dans le sable marin qui là-bas est envahissant. » [1]
Jean Sargos dans son ouvrage Les Landes, naissance d’un paysage [2] insiste sur cette perception négative :
« Les voyageurs souffraient en toutes saisons. Il fallait bien passer par les Landes pour aller en Espagne. Les pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle le savaient, qui se plaignaient des mouches, de la chaleur, des sables mouvants, du manque de pain, du manque de vin, de manque de viande, du manque de sources. En diligence, quatre jours étaient nécessaires pour faire la traversée ».
Sources
– Ce chapitre résulte d’une reprise augmentée et illustrée d’une étude consacrée à l’histoire des Landes et à leurs représentations pour une première version, non publiée, de l’atlas des paysages (2004).
[1] Citation extraite du recueil de textes « Je vous écris des Landes » publié par les éditions Pimientos en 2014 qui l’attribue à Aimery PIcaud, considéré comme l’auteur du Guide du Pèlerin, premier ouvrage consacré au pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle.
[2] Publié en 1989 aux éditions l’Horizon chimérique